-
Là où je voudrais vivre (et où peut-être je vis déjà) Si Armilla est ainsi parce qu’inachevée ou démolie, s’il y a à son origine un sortilège ou seulement un caprice, je l’ignore. Le fait est qu’elle n’a ni murs, ni plafonds, ni planchers : elle n’a rien qui la fasse ressembler à une ville,…
-
À l’homme qui chevauche longuement sur les terres sauvages vient le désir d’une ville. Il arrive finalement à Isidora, ville où les immeubles ont des escaliers en colimaçon incrustés de coquillages marins, où l’on fabrique selon les règles de l’art longues-vues et violons, où l’étranger qui hésite entre deux femmes en rencontre toujours une…
-
C’est quelque chose qui bat au vent. Une peau, un drap ? un volet, un loquet ? ou une branche, un poing ? Ça danse et se déglingue, rythme soutenu qui pourtant cloche. Voilà comment j’entends la prose de Pierre Michon, une splendeur en haillons, une magnificence mitée, le visage d’or délicat d’une jeune fille fuyant son père…
-
Il y a une épaisseur du langage qui ne tient pas à la longueur de la phrase ou à la grosseur du livre. Elle tient aux mots, à leur pâte, levée à la graine des choses. Des mots riches qui charrient l’indistinct crevé d’éclats, des mots feuilletés qui s’effeuillent avec une bonne odeur de beurre,…
-
J’aime la simplicité parce que je suis compliquée. Je ne peux penser sans arrière-pensées, dire sans contredire, voir sans revoir, désirer sans détruire… Distraite et incertaine, la simplicité me concentre et m’éclaircit. Je ne recule pas devant l’effort jouissif de la pensée qui se gravit et se surmonte. Mais c’est l’évidence qui m’enchante. Comme elle…
-
Le temps volé, le seul qui ne soit pas du temps perdu. Dérobé au temps compté. Tes mains laborieuses et volontaires, qui œuvraient pour faire sens et pallier nécessité, un jour abandonnèrent. Tu volas du temps, pour la première fois. Ce temps d’or pénétra ton temps de plomb, le fissura, le pulvérisa… C’était ta vie…
-
En titre, un vers d’Ilarie Voronca.
-
Patrizia Valduga est née en 1953 et vit à Milan. Elle est poétesse et traductrice. Ici des passages qui m’ont frappée de Donna di dolori : une femme morte et enterrée se décompose tandis que son esprit, encore lucide et conscient, se révolte, se rappelle, observe, en hendécasyllabes à rimes suivies, avec un niveau de langage…
-
Un temps où tu n’écrivais qu’à la plume. L’école et ses règles : ne pas se répéter, varier le vocabulaire, éviter être et avoir, ne pas dire je, ne pas dire on, encore moins l’on, pas d’il y a, de c’est, ni de point d’exclamation, ou d’interrogation, à la fin de phrases qui se suivent,…
-
Pour qui écrit-on ? Non pas pourquoi mais pour qui. Pourquoi renvoie de fil en aiguille (pourquoi se lever, manger, marcher, etc.) à vivre ou mourir, être ou ne pas être. Pour qui est plus juste. Toute parole est adresse. Alors adresse à qui ? L’écriture imagine son lecteur. Même l’écriture pour soi dans l’intimité de sa…