Il y a une épaisseur du langage qui ne tient pas à la longueur de la phrase ou à la grosseur du livre. Elle tient aux mots, à leur pâte, levée à la graine des choses. Des mots riches qui charrient l’indistinct crevé d’éclats, des mots feuilletés qui s’effeuillent avec une bonne odeur de beurre, des mots bruts et brisés qui caressent rudement comme si on était cheval, des mots souples qui s’ébrouent et éclaboussent de clarté. Comme notre chair était mince et plate avant eux, comme on s’incarnait peu. Ils n’ont pas le pointu, le précis et le juste, cette pauvreté précieuse de l’écriture blanche, mais une grande générosité bariolée. Ils manquent à épingler ce qu’ils désignent car ils préfèrent l’entourer, le prendre dans leur main comme divine.
« — Les serpents, je te dis. Ceux de mes doigts. J’ai des serpents dans les doigts. Je sens les écailles passer dans ma viande.
Son petit rire craque comme une pomme de pin qu’on écrase.
— Je les guette. Quand leur tête est au ras de l’ongle, je la serre, je la tire, toute la bête sort, alors je la jette par terre. Pendant ce temps, l’autre monte dedans le doigt, je la tire et je la jette aussi. C’est un long travail, mais quand ma main sera vide, j’aurai plus mal. »
Colline, Jean Giono
Ah ! Merci… 🙂
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Je vous en prie. Merci de me lire si fidèlement. 🙂
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Je me disais (rien à voir avec Giono, ou peut-être que si), si nous continuons à discuter par commentaires interposés, nous pourrions peut-être nous tutoyer ?
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Ahah, oui c’est mieux, j’avais songé à te le proposer puis oublié…
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Ah, une bonne chose de faite ! 🙂 Bonne nuit !
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Oui ! Rêves d’or, comme on dit ici
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