Récit de rêve
Avec Camille, dans un supermarché. Nous achetons un bébé, logé dans un panier, comme un œuf de Pâques, tout rond et rose. Il a l’air d’avoir chaud, même s’il est posé près du rayon frais, à côté des œufs, les vrais, dans leurs cartons.
Ensuite, nous sommes en voiture, assises derrière. Deux grands-mères, à l’avant, conduisent. Cet enfant, c’est pour toute la vie. Ce n’est pas le caprice d’un moment, mais un véritable engagement. On se rend compte en cet instant.
Je le prends dans mes bras, mais il ne m’aime pas parce que « je n’ai pas le visage assez doux », il veut retourner avec Camille qui a « le visage vraiment doux ». Je le lui rends et il grandit sous nos yeux. Devenu enfant, il se coule par la fenêtre, court à côté de la voiture, aussi vite qu’elle, mais les grands-mères se moquent de lui et j’interviens : « surtout qu’il n’ait pas honte ». Mon amie m’entend et passe son bras par la fenêtre pour le ramener entre nous.
Nous arrivons à une colline sableuse où des éléphants en perles brodées montent à la file. Mais ils glissent, tombent les uns sur les autres, s’entassent. Surtout les derniers de la file. Nous sommes sortis de la voiture – Camille, l’enfant et moi. Il demande : « pourquoi ils tombent ? » ; et je lui montre, chez certains d’entre eux, les plus lourds, les derniers, les perles qui perdent leurs couleurs et effacent leurs motifs, prenant une teinte grise uniforme : « parce qu’ils sont dépressifs ».
Si je ne peux pas aider l’enfant à cause de mon visage, je peux sauver les éléphants. Parce que je sais voler. Ou plutôt je savais. J’essaye, sans y parvenir, quand je me souviens de la sensation du vol, en fermant les yeux, et dès cet instant du vol lui-même. J’arrive sur un toit vert, où se trouve ma première amie, Marie, la rousse. Elle dit, à peine dédaigneuse : « Ah, je croyais que tu ne savais plus. Moi, je n’ai jamais oublié. »
Je pousse les éléphants qui reprennent leur élan, et en même temps, leurs couleurs, leurs motifs, et je continue à voler, au-dessus d’eux, loin d’eux, les yeux à demi clos de crainte que l’enchantement ne se dissipe. Entre mes cils, je discerne de hautes et fines tours blanches entrelacées de mouvantes tornades dans le ciel rose et mauve du couchant, et j’atterris enfin sur le versant d’une montagne pierreuse, au milieu de tombes abandonnées.
C’est un vieux cimetière. Je descends dans le village désert. Un chien me poursuit, saute autour de moi, il essaye de mordre ma main pour la ronger jusqu’au poignet. De cet os-là, précisément, il veut se régaler. Un homme m’ouvre sa porte et me montre son musée privé sur les vampires. Il ne cesse de parler et sa parole est poussière. Sa maison est une cave. Je meurs déjà d’ennui et d’ensevelissement, je pressens dans ce lieu d’innommables tortures. Plutôt que de subir ça, je me réveille.
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