Récit de rêve
Un homme prend la route dans son sous-marin. Sa fille est malade et le remède se trouve au pôle nord. Il aborde la banquise par en-dessous, visse son engin au sous-sol d’un édifice et entre ainsi dans la ville, aux jolies couleurs pastel pailletées par le gel. Mais dehors l’attend tout l’inverse d’une régénérescence : il se décompose. Les os de ses mains se changent en cinq brindilles et la chair retombe entre elles sous forme de coraux et de mollusques mêlés. Il les tend à un passant et tente de lui parler. La voix lui manque, n’ayant plus d’organes humains. Par désespoir, il se jette dans la mer. Sous l’eau, un tourbillon se forme entre lui et le soleil brouillé et le ramène la surface. Il débouche chez lui, dans son appartement vide, ayant retrouvé ses vingt ans, sa blondeur, ses larges épaules, ses jambes solides. Le parquet craque sous son poids. Il comprend qu’il ne doit pas rapporter le remède à sa fille, mais l’amener là-bas pour qu’elle ressuscite à son tour. Cependant, sur un chemin dans la campagne rase, la fille s’agenouille auprès de son père qui vient de tomber, face contre terre. De lui, il ne reste que le manteau vide, le corps réduit à une branche nue, une unique feuille frémissant à la place de la tête. La fille tremble : le vent agite la feuille et risque de l’emporter.
Même nuit.
Dans une salle d’attente avec ma mère. Elle me dit : « Je ne t’ai pas élevée parmi les livres pour que tu en fasses ta vie, mais pour… pour qu’on en discute. » La pharmacienne m’appelle au guichet et me donne une pilule minuscule qui occupe seule mon sac immense.
Nuit suivante.
Des nouveau-nés à la peau inachevée. On doit les envelopper dans des bandelettes trempées dans le miel, pour que l’épiderme se referme. De dos, une femme nue, assise sur un lit. Petite, elle a souffert de cette pathologie. Ses épaules rondes ont des reflets cuivrés, souvenir du miel qui l’a sauvée. Entre le sein et l’aisselle, la blancheur d’une cicatrice signale l’endroit où la peau a peiné à se ressouder.
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